Laïcité et Constitution européenne
Quelques semaines avant le referendum sur le projet de Constitution européenne, ceux attachés à la laïcité n'ont de cesse d'exposer quelques extraits du texte: ceux-ci semblent mettre à mal notre principe tout juste centenaire (avec la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat) au sein d'une Europe où la laïcité à la française aurait du mal à trouver sa place.
Il s'agit d'abord du préambule, qui a valu bien des débats sémantiques et des pressions (pape, conférences épiscopales etc) reprochées aux uns et aux autres, avant de s'entendre sur la version suivante:
"s'inspirant des héritages culturels, religieux et humanistes de l'Europe, à partir desquels se sont développés les valeurs universelles que constituent les droits inviolables et inaliénables de la personne humaine, ainsi que la liberté, la démocratie, l'égalité et l'Etat de droit;"
Certains critiquent le fait qu'on accorde à la religion (même pas aux églises), le statut de co-fondateur, co-facilitateur de l'émergence des valeurs les plus importantes de nos sociétés occidentales.
L'article I-52 donne aussi à réfléchir:
"3. Reconnaissant leur identité et leur contribution spécifique, l'Union maintient un dialogue ouvert, transparent et régulier avec ces églises et ces organisations".
J'ai laissé de côté la référence (l'alinea 1) aux associations et communautés religieuses, placées avec les églises: autre aspect conflictuel. Concernant l'alinea 3, les questions qu'on peut se poser ne manquent pas: quelles seront les thèmatiques abordées? dans quelles perspective? Enfin, ce "dialogue" entre le politique et le religieux ré-ouvre la porte de la sphère publique à un sentiment religieux qui, dans la tradition laïque française, n'avait sa place qu'in petto.
Pour terminer, c'est certainement l'article II-70 qui entraîne le plus de protestations:
"Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites."
Evidemment, chacun de penser à la jeune loi de mars 2004, interdisant le port de signes ou tenues manifestant une appartenance religieuse. Y a-t-il incompatibilité entre la loi française, Contitution comprise, et le texte européen? Doit-on s'attendre à une jurisprudence européenne donnant raison aux justiciables venus trouver auprès d'elle la légitimisation d'une foi revendiquée et portée publiquement? Certains le croient.
D'autres, au contraire, ont un discours plus rassurant: s'appuyant sur la décision du Conseil constitutionnel du 19 novembre 2004 (saisi par le président de la Réublique aux fins d'établir si la ratification de la Constitution européenne exigeait une révision de la Constitution française), ils avancent que l'article II-70 a été commenté par les rédacteurs de manière à écarter toute crainte de voir la laïcité à la française être balayée. Selon ces derniers, cet article a la même portée et les les mêmes limitations, dans son exercice, que son homologue article 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme: à savoir que les restrictions apportées à ce droit sont définies par la loi pour défendre la sécurité publique, la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou la protection des droits et libertés d'autrui. La jurisprudence de la Cour européenne de Strasbourg a toujours replacé les cas qui lui étaient présentés dans le cadre et en harmonie avec la tradition constitutionnelle du pays concerné.
Inquiétudes fondées? il est difficile de répondre aujourd'hui. Ce qui fait la souplesse d'un loi, sa vie, son adaptabilité à la société en mouvement, la jurisprudence, cette jurisprudence peut maintenir un statu quo ou fragiliser cette laïcité si chère à beaucoup.
Il s'agit d'abord du préambule, qui a valu bien des débats sémantiques et des pressions (pape, conférences épiscopales etc) reprochées aux uns et aux autres, avant de s'entendre sur la version suivante:
"s'inspirant des héritages culturels, religieux et humanistes de l'Europe, à partir desquels se sont développés les valeurs universelles que constituent les droits inviolables et inaliénables de la personne humaine, ainsi que la liberté, la démocratie, l'égalité et l'Etat de droit;"
Certains critiquent le fait qu'on accorde à la religion (même pas aux églises), le statut de co-fondateur, co-facilitateur de l'émergence des valeurs les plus importantes de nos sociétés occidentales.
L'article I-52 donne aussi à réfléchir:
"3. Reconnaissant leur identité et leur contribution spécifique, l'Union maintient un dialogue ouvert, transparent et régulier avec ces églises et ces organisations".
J'ai laissé de côté la référence (l'alinea 1) aux associations et communautés religieuses, placées avec les églises: autre aspect conflictuel. Concernant l'alinea 3, les questions qu'on peut se poser ne manquent pas: quelles seront les thèmatiques abordées? dans quelles perspective? Enfin, ce "dialogue" entre le politique et le religieux ré-ouvre la porte de la sphère publique à un sentiment religieux qui, dans la tradition laïque française, n'avait sa place qu'in petto.
Pour terminer, c'est certainement l'article II-70 qui entraîne le plus de protestations:
"Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites."
Evidemment, chacun de penser à la jeune loi de mars 2004, interdisant le port de signes ou tenues manifestant une appartenance religieuse. Y a-t-il incompatibilité entre la loi française, Contitution comprise, et le texte européen? Doit-on s'attendre à une jurisprudence européenne donnant raison aux justiciables venus trouver auprès d'elle la légitimisation d'une foi revendiquée et portée publiquement? Certains le croient.
D'autres, au contraire, ont un discours plus rassurant: s'appuyant sur la décision du Conseil constitutionnel du 19 novembre 2004 (saisi par le président de la Réublique aux fins d'établir si la ratification de la Constitution européenne exigeait une révision de la Constitution française), ils avancent que l'article II-70 a été commenté par les rédacteurs de manière à écarter toute crainte de voir la laïcité à la française être balayée. Selon ces derniers, cet article a la même portée et les les mêmes limitations, dans son exercice, que son homologue article 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme: à savoir que les restrictions apportées à ce droit sont définies par la loi pour défendre la sécurité publique, la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou la protection des droits et libertés d'autrui. La jurisprudence de la Cour européenne de Strasbourg a toujours replacé les cas qui lui étaient présentés dans le cadre et en harmonie avec la tradition constitutionnelle du pays concerné.
Inquiétudes fondées? il est difficile de répondre aujourd'hui. Ce qui fait la souplesse d'un loi, sa vie, son adaptabilité à la société en mouvement, la jurisprudence, cette jurisprudence peut maintenir un statu quo ou fragiliser cette laïcité si chère à beaucoup.